jeudi 9 octobre 2008

BRONCHITE CHRONIQUE : RIEN QUE DE L'ANCIEN

Spiriva / Tiotropium : la fin ?

Une étude contrôlée comparative versus placebo (respectivement 2987 et 3006 patients porteurs d’une bronchite chronique) qui vient de paraître dans le New England Journal of Medicine (http://content.nejm.org/cgi/content/short/359/15/1543?query=TOC) montre qu’à quatre ans le spiriva / tiotropium améliorait significativement la fonction respiratoire, la qualité de vie et le nombre d’exacerbations (-14 %) mais ne réduisait pas la détérioration du VEMS au cours du temps pas plus que la mortalité.

Commentaires : Spiriva / tiotropium est un bon traitement symptomatique. Pas plus ! Pourquoi faudrait-il le prescrire ?


Nous rappelons ici qu’une méta-analyse publiée par la FDA http://www.fda.gov/cder/drug/early_comm/tiotropium.htm a montré un excès d’AVC dans le groupe spiriva / tiotropium de 2 / 1000.

Spiriva / tiotropium : pourquoi en prescrire ?

samedi 4 octobre 2008

QUAND LA LUTTE CONTRE LE TABAGISME DEVIENT SUSPECTE

QUAND LA LUTTE CONTRE LE TABAGISME DEVIENT SUSPECTE
NON AUX CAMPAGNES ANTI TABAC !
Quelle mouche a donc piqué le Formindep, http://formindep.org/, organisme prônant "...une formation et une information médicales indépendantes au service des seuls professionnels de santé et des patients" (on m'expliquera qui cela peut laisser indifférent : les professionnels de santé malades ?) et dont le maître-mot est la transparence (nous reviendrons ailleurs sur cette obsession), de fonder l'alter-tabacologie par le truchement du professeur Robert Molimard http://formindep.org/spip.php?article194.

Et qu'est-ce qu'un lecteur non averti pourrait en retenir ?

Que les campagnes anti-tabac sont méprisables puisqu'elles sont subventionnées par les marchands de médicaments.

A partir de là, comme dirait le philosophe français Didier Deschamps, il est suggéré que l'Europe a mis en place "une chasse aux fumeurs" et tout cela par le biais de deux laboratoires anglo-américains, parangons de l'hygiénisme... à l'anglo-saxonne.

Diable !

Où le Formindep veut-il en venir ?

Je crains que la Santé Publique ne soit oubliée dans ce combat douteux.

Si j'ai bien compris, l'article du professeur tabacologue se fonde sur sa critique d'un rapport sur le tabagisme passif " Lifting the SmokeScreen, 10 reasons for Smoke Free Europe " publié en février 2006 sous l’égide [c'est le professeur Molimard qui écrit :] de l’European Respiratory Society, de Cancer Research UK, de l’European Heart Network et de l’Institut National du Cancer.


Il oublie de dire que le rapport a été initié par le parlement Européen qui, comme on le sait, est un repaire de lobbyistes anti tabac.


Le professeur Molimard, donc, y relève des erreurs, des approximations et des mensonges et en conclut qu'il s'agit d'une campagne d'intoxication (non tabagique) menée par les laboratoires Pfizer et Glaxo pour vendre leurs molécules (qu'il cite d'ailleurs expressément)... Il finit son intervention formindepienne par une phrase vigoureuse : "La fin ne justifie pas les moyens. Le mensonge décrédibilise les meilleures causes."


Certes. Qui ne pourrait être d'accord ?

Mais quels sont les tenants et les aboutissants de cette affaire ?

Existe-t-il des conflits d'intérêt cachés ?

Ne connaissant pas le professeur Molimard, j'ai tenté de me renseigner sur lui.

J'en conclus ceci :
1) Sur les sites non professionnels, et pour vendre son livre, il tient d'abord un discours pour cours élémentaire sur les trois cerveaux http://www.linternaute.com/femmes/itvw/0402molimard.shtml qui me paraît d'une indigence absolue...

2) Toujours au même endroit, à la question "La solution vient-elle des antidépresseurs ?" il répond souvent prescrire un antidépresseur en première intention, tout en précisant : C'est une frustration, un deuil que l'on fait : c'est normal de se sentir un peu déprimé. Mais ce n'est pas une dépression organique. On est rassurés.

3) Il médicalise l'arrêt du tabac, il fait de la tabacologie une spécialité, et seuls les tabacologues diplomés (par le grand professeur) ont le droit de proposer l'arrêt du tabac. Voici comment les centres, où le professeur conseille d'aller, sont agréés : "si un centre possède un responsable qui est médecin diplômé de tabacologie ou quelqu'un qui a fait la preuve de ses compétences en matière de tabac, par exemple au travers de publications scientifiques sur le sujet."

Le médecin généraliste lambda peut aller se rhabiller.

Il s'agit donc peu ou prou d'une prise d'intérêts dans le domaine de la lutte anti tabac, le professeur Molimard ayant une méthode (les trois cerveaux + la psychiatrie analytique + les anti dépresseurs), brevetée (par la société de tabacologie), un site internet exfumeur.com, et les thérapeutes doivent être diplomés de la société ou avoir publié dans des revues scientifiques, être familiarisés avec l'analyse freudienne (faut-il être analyste analysé et analysant ?), prescrire des antidépresseurs qui ne soient pas le champix (si j'ai bien compris) ou le zyban (ai-je encore compris ?), et être des ex fumeurs.

Molimard a-t-il voulu recréer les AA ?

Mais il y a encore autre chose : serait-ce à la fois un combat contre le tabac et un combat contre l'hygiénisme ?


Le terme hygiénisme a des acceptions diverses mais le professeur Molimard voudrait-il dire qu'il faut combattre le tabac sans stigmatiser les fumeurs ? Ce serait plus acceptable.


J'attends des réponses indignées.


Donc, le titre de ce message était trompeur : le tabac est toujours une saloperie mais seul le professeur Molimard est capable de faire s'arrêter les patients sans les rendre coupables (sinon d'être déprimés).

jeudi 2 octobre 2008

DEPISTAGE DU CANCER DU SEIN : LES INFORMATIONS GRAND PUBLIC

Le deux octobre 2008, lors de l'émission Télé Matin, une journaliste (?), Brigitte Fanny Cohen, a fait la promotion du dépistage du cancer du sein.

On sait que le dépistage généralisé du cancer du sein par mammographie ne diminue pas la mortalité globale. Enfin, on sait : certaines personnes savent et la majorité des professionnels de santé le cachent ou se le cachent (on pourra discuter longuement du fait qu'il s'agit de mauvaise foi, d'intérêts financiers ou académiques, mais nous parierons sur une autre donnée : l'INCOMPETENCE).

Mais, comme l'a écrit La Revue Prescrire : si on devait aujourd'hui mettre en place un tel système de dépistage en France, on conseillerait de ne pas le faire. Mais, en l'état actuel des choses, ce serait non adéquat d'arrêter (pour des raisons psychologiques).
La Revue Prescrire (2007;288[octobre 2007]: 758-62) Dans la population générale sans risque particulier, avant l'âge de 50 ans, le dépistage du cancer du sein par mammographies n'apporte aucun bénéfice démontré. Entre 50 ans et 69 ans, l'efficacité du dépistage actuel est de faible ampleur. Au-delà de l'âge de 70 ans, on ne dispose pas de données d'évaluation suffisantes pour proposer ce dépistage.

Quoi qu'il en soit, qui a-t-on décidé d'interroger ? L'inénarrable professeur David Khayat, celui qui a été viré de l'INCA (Institut national du Cancer) pour des raisons essentiellement de népotisme... Pour le remettre en selle ? Pour que sa consultation se repeuple ?

Il a pontifié sur le dépistage... On ne pouvait s'attendre ni à mieux ni à pire.

Monsieur le professeur a-t-il dit que la principale cause de diminution du nombre de diagnostics de cancers du sein a été l'arrêt (aux Etats-Unis où des données statistiques existent, car, en France les épidémiologistes en sont encore à utiliser un crayon et une gomme) probable des traitements hormonaux substitutifs de la ménopause depuis plusieurs années. Moins 12 % pour les cancers du sein hormonaux dépendants. Une paille.

Quant à notre ami Didier Houssain, on attend encore un commentaire...

La journaliste (?) de Télé Matin fait le travail qu'on lui demande : croire les experts qui se prétendent indépendants et qui auto affichent leur compétence.

SECRET MEDICAL EN DANGER DANS LES STRUCTURES PUBLIQUES

SECRET MEDICAL : UNE CHIMERE

Alors que la majorité des auteurs tente d'alerter sur le problème du secret médical vis à vis des assurances privées, il est moins commun d'entendre parler des structures publiques et semi publiques.
Deux exemples (les noms et les maladies ont été changés tout comme les circonstances exactes car ce blog est public) :
Mairies : Il suffit qu'une assistante maternelle soit porteuse d'une hépatite B chronique pour que tout le personnel, les parents, les politiques, soient au courant. Une secrétaire administrative de la mairie de mon lieu d'exercice m'appelle pour me dire qu'il est "scandaleux" que l'on ne retire pas son agrément à Madame H (dont je suis le médecin traitant) sous prétexte qu'elle est peut être contagieuse.
MOI : Comment savez-vous cela ?
ELLE : Je le sais.
MOI : Vous avez des preuves ?
ELLE : Non, mais...
MOI : Premièrement, ce n'est pas à vous de vous occuper de cela, c'est au médecin du travail ; deuxièmement : je vous interdis d'en dire un seul mot, d'autant plus que ce n'est pas forcément vrai, vous m'entendez, un seul mot, à un collègue de bureau, à votre supérieur hiérarchique, à votre mari, à votre voisine, sinon vous seriez sous le coup d'une violation du secret médical.
Commentaires : L'hépatite B chronique n'est pas une maladie à déclaration obligatoire. Une secrétaire administrative ne doit pas être au courant de ce genre de choses et encore moins d'en faire état.
Education Nationale : Le CPE d'un lycée de ma ville m'appelle , en tant que médecin traitant, j'imagine, pour me demander si la maladie de Monsieur M, professeur d'anglais, est grave et si cela présente un danger pour le personnel et pour les élèves.
MOI : Comment avez-vous le culot de me poser une question pareille ?
LUI : Pour la sécurité des usagers du lycée.
MOI : Vous n'êtes pas en charge de cela. C'est le médecin scolaire ou le médecin du travail qui doit prendre des décisions. J'espère que vous n'avez pas diffusé le fait que Monsieur M est malade car vous seriez sous le coup d'une violation du secret médical. Comment l'avez-vous appris ?
Silence au bout de la ligne.
MOI : Cela m'étonnerait que ce soit Monsieur M qui vous en ait parlé.
LUI : Non, ce n'est pas lui.
MOI : J'espère que ce n'est pas en lisant le motif sur l'arrêt de travail.
Silence.
MOI : Je vous interdis d'en dire un quelconque mot autour de vous ou sinon je demanderais à l'enseignant que je vais appeler aussitôt de demander à un avocat de vous assigner en justice.
LUI : Mais...
MOI : J'espère que vous avez bien compris...
Commentaires : L'Education Nationale exige que le motif de l'arrêt soit mentionné et les enseignants donnent toutes les feuilles à l'administration. C'est ainsi que tout le lycée a appris que Monsieur M avait une maladie de Hodgkin.

jeudi 25 septembre 2008

EBM : LES INCERTITUDES, LES CRITIQUES ET LES RETICENCES

L’Evidence Based Medicine (EBM) : une idéologie ou une méthode ?


2) Les incertitudes, les critiques et les réticences
L’EBM, on l’a vu, c’est tenter de relever les défis de la formation continue, de l’intégration méthodique du nombre croissant des publications médicales, de l’évaluation des pratiques et de la communication avec le patient / malade.

L'EBM, c’est l’intégration à l’expertise clinique et aux valeurs du patient des meilleurs faits (ou preuves) issus de la recherche

C’est une aide à la compréhension, au diagnostic et à la décision.

C’est pourquoi s’opposer à l’EBM paraît curieux.
L' EBM, avec ses trois piliers (expertise interne, expertise externe et patient) requiert de la part du clinicien une grande exigence ce qui peut entraîner des inquiétudes chez ses tenants convaincus (pourrais-je jamais être au niveau de ces impératifs inatteignables ?) comme chez ses tenants de circonstance (comment me faire passer pour un bon ebéèmien ?) mais devrait encourager ses adversaires qui peuvent crier en montant sur la table « Vive l’EBM ! » et faire ce qu’ils veulent.
On comprend alors les inquiétudes des tenants de l’EBM mais moins de ses adversaires qui pourraient y voir une porte ouverte sur le "On fait comme d'habitude".
Tout médecin, confronté à une situation clinique et à un patient unique, devrait faire de l’EBM sans le savoir, voilà une phrase que les partisans de l’EBM n’aiment pas (car elle supprime l’exigence) et que ses détracteurs apprécient (parce qu’elle simplifie la tache).
Parce que la méthode EBM implique des contraintes. Les « scientifiques » se voient accuser de privilégier l’expertise externe (et surtout les essais contrôlés) et les artistes de privilégier l’expertise interne (l’intuition libre).

La difficulté fondamentale de l’EBM vient de ce qu’il existe une double relation asymétrique :

- entre l’expertise interne et l’expertise externe d’une part (il est toujours possible de soupçonner l’expertise externe « objective » de dominer a priori l’expertise interne « subjective » et surtout d’induire qu’il existe toujours des « preuves » applicables méconnues susceptibles d’infirmer l’expérience du praticien)

- et entre l’expert praticien et le patient / malade soigné potentiel (dont la seule expertise est sa demande, la façon dont il la vit et le contexte de ses valeurs et de ses préférences – sans compter ses agissements).

Mais le principal problème est : le médecin praticien doit arbitrer entre ces trois angles de vue afin de prendre une décision qui soit le plus en accord avec l’Etat de l’Art et celui de la société dans laquelle vit, pense et agit son patient. On le voit, la véritable asymétrie vient de ce que le praticien est juge et partie et peut se croire le maître du monde en se servant consciemment ou inconsciemment de la méthode EBM).
Dernier problème (et non des moindres) : s'il existe un consensus sur les deux premiers piliers, la partie patient / malade est extrêmement négligée par la littérature. Nous y reviendrons.
EN CONCLUSION : L'EBM définit un cadre théorique dans lequel le praticien se doit de s'intégrer pour pratiquer une médecine "moderne", c'est à dire informée et pratique. En quoi cela pourrait-il être gênant ou contraignant ? Chacun peut y voir une incitation à "mieux" diagnostiquer, prescrire, améliorer le contact avec ses malades.


HEPATITE B ET SEP : LE VACCIN ENFIN EN CAUSE ?

ALERTE !


Nous y reviendrons quand nous aurons lu l'article princeps : dans Le Monde de ce jour (vendredi 26 septembre 2008) Paul Benkimoun signale qu'une étude française, probablement cas témoin, sur le point d'être publiée montrerait un lien entre la vaccination par le vaccin Engerix B et la survenue de sclérose en plaque (SEP) chez l'enfant.


Les lecteurs de ce blog savent combien nous émettons des doutes sur la validité de la préconisation de la vaccination universelle contre l'hépatite B (non recommandée en France malgré les efforts de l'industrie pharmaceutique et de ses agents) en raison des risques de survenue de SEP.

que la seule étude non sponsorisée par l'industrie pharmaceutique (Hernan) montrait un lien entre la vaccination contre l'hépatite B et la survenue d'une SEP dans une population de professionnels de santé.
Il semble que la DGS délibère actuellement et hésite en commençant par publier un communiqué rassurant "Nous allons mesurer la portée de cette étude. Cependant, son analyse préliminaire ne remet pas en question les recommandations de vaccination. En l'état actuel, le ministère de la santé maintient donc les recommandations vaccinales". Le docteur Houssain hésite (vous pouvez faire votre choix) :
a) par ignorance
b) par intérêt académique
c) par intérêt extra académique
d) pour ne pas désespérer Billancourt
e) pour ne pas perdre la face
f) pour aucune raison.
A SUIVRE

jeudi 4 septembre 2008

MEDICALISATION DE L'INFERTILITE

Une étude décoiffante.

Des auteurs écossais ont comparé trois techniques pour obtenir des bébés chez des femmes dont le mécanisme d’infertilité était inconnu.


Critères d’inclusion : Au moins deux ans d’infertilité, perméabilité tubaire avérée, ovulation détectée, et sperme “normal”.

Méthodes : Cette étude a été menée sur trois bras parallèles avec randomisation pragmatique pendant six mois


- groupe témoin : conseils sur la nécessité d’avoir des rapports sexuels, pas de courbe de température, pas de médicaments, pas de kits pour doser la progestérone, pas de visites ou d’examens programmés


- groupe clominofène : les femmes recevaient 50 mg de clominofène entre J2 et J6 de leur cycle. Durant le premier cycle elles subissaient un scanner transvaginal et un contrôle de la progestérone. Les cycles suivants étaient suivis par un contrôle de la progestérone. On demandait aux couples d’avoir des rapports sexuels entre D12 et D18 du cycle. Si au moins trois follicules ovariens étaient détectés dans le premier cycle, le cycle était interrompu et le couple était avisé de ne plus avoir de rapports. Le cycle suivant, les femmes qui avaient été trop stimulés recevaient 25 mg de clominofène et les mêmes mesures que lors du premier cycle étaient effectuées….


- insémination intra-utérine non stimulée : on demandait aux femmes de monitorer les concentrations matinales de LH à partir du douzième jour du cycle et l’insémination était effectuée….

Résultats : 580 femmes ont été randomisés dans les trois groupes témoin (193), clominofène oral (194) ou insémination intrautérine non stimulée (193).

Les trois groupes étaient comparables.

Le nombre de naissances a été respectivement de 17 %, 14 % et 23 % (NS). Significativement plus de femmes randomisées dans les groupes 2 et 3 (repectivement 94 et 96 %) ont trouvé l’étude acceptable que celles du groupe témoin (80 %).

Conclusion : Pour les couples présentant une infertilité non expliquée, les traitements comme l’usage empirique du clominofene et l’insémination intrautérine non stimulée n’apportent pas un taux de naissances supérieur à la méthode non médicalisée.


Johnstone, S Kini, A Raja and A Templeton
McQueen, H Lyall, L Johnston, J Burrage, S Grossett, H Walton, J Lynch, A
S Bhattacharya, K Harrild, J Mollison, S Wordsworth, C Tay, A Harrold, D

Pragmatic randomised controlled trial
management for unexplained infertility:
insemination compared with expectant
Clomifene citrate or unstimulated intrauterine
BMJ 2008;337;a716

http://www.bmj.com/cgi/content/full/337/aug07_2/a716